_ “Marilyn, Histoire de la Beauté” _

Spaziu culturale Natale Rochiccioli _ Carghjese _ 24 Février _ 20h30 _

Marylin

Il était une fois une icône. Une jolie rousse venant des milieux défavorisés qui va devenir la blonde incendiaire du grand écran; la matrice des actrices, le final d’un feu d’artifice qui se déclenche à chaque fois que son nom est prononcé. Norma Jean a créé Marilyn Monroe. Le paradoxe sur jambes. L’incarnation de la lumière, du fantasme, LA femme publique appartenant à tous … et à personne. Femme secrète, fragile, vulnérable, incompatible avec le bonheur. Il est impossible de raconter son histoire; la vraie. Et ce n’est pas ce qui nous intéresse. Mais plutôt de s’arrêter sur l’empreinte laissée par la femme la plus enviée du Monde qui aura été l’une des moins aimée. Marilyn est passée par là, elle a tout renversé sur son passage, elle aura été le chamboule-tout après qui plus rien n’est comme avant. Et depuis, chacun veut son droit à raconter, expliquer, à dire qu’il était là, qu’il sait. Chacun a son envie. Les théories pullulent même soixante ans après sa mort. Sauf que voilà, l’ingénue, la blonde idiote, l’orpheline, la maitresse de tout un pays, la femme de pouvoir, la tête d’affiche, la poète qui écrivait sans cesse des textes secrets et oniriques, celle dont on disait qu’elle aurait pu être heureuse si elle avait été plus stupide, tout ça et plus encore, ne sont que de petits morceaux de la boule à facette qu’elle est. Insaisissable, inaccessible, en quête perpétuelle de consolation, d’un refuge. Elle est partie sans prévenir. Mystère de son vivant, mystère dans la mort. Ce qui est certain, c’est que « sa mort a fait disparaître un peu de la beauté du monde dans lequel nous vivons. » dira Life Magazine.

Que fait-elle résonner en nous? Dans une époque où les femmes se lèvent pour l’égalité, pour ne plus se taire, pour s’asseoir à la table, quitte à se battre, pour ne plus être objectivées… Norma Jean a créé son double magnifique et maléfique. Elle est allée jusqu’au confins de la féminité. Sans plus jamais pouvoir faire machine arrière. Et de cette ambivalence, il devient possible pour nous de raconter une histoire. Pour exister, pour se sentir exister, jusqu’où sommes-nous prêts à aller? Il est impossible de savoir, de comprendre le point de bascule où le rouleau compresseur d’une industrie a eu raison de la femme, de l’héroïne. Est-ce que l’éclat de son nom est un signe de plus de cette société phallocrate qui refuse de céder la place? Que reste-t-il vraiment après tant de temps ? Peut-on toujours regarder l’affiche de « Sept ans de réflexion » sans ressentir, pour la première fois, une réserve? Cette jupe blanche qui s’envole et dévoile le corps de la déesse n’est pas que le triomphe d’une star, mais aussi du regard de tant d’hommes qui trouvaient là, une ambassadrice de toutes les pulsions, une complice qui les autorise à regarder. La voir, en sourire, la sève qui monte et puis quoi? …. Notre spectacle existe en marge de Marilyn Monroe. Il n’existe pas pour en faire un martyr, pour faire le procès d’une société qui, de toute façon, ne l’attendait pas pour fonctionner de la sorte et a renforcé le trait depuis. Mais Marilyn est la colonne vertébrale de notre création. Usant de ses propres textes parfois, de la musique souvent, live, il s’agit de raconter ça. Le destin. Le besoin d’avoir un destin. De jouer des coudes pour se faire une place, quitte à se battre, quitte à mettre des perruques, changer qui nous sommes, quitte à mentir, avaler des couleuvres, et tenir debout. Envers et contre tout. Qui sommes-nous si nous regardons cette étoile en ne lui accordant aucune compassion, aucune empathie? Si nous ne voyons que ce qu’elle n’a eu de cesse de montrer. Ses seins, ses lèvres, ses jambes. Sa beauté. Belle à en mourir. Belle et vidée.

L’héritage de Marilyn Monroe est encore à définir. Il n’est pas que cynique et défaitiste. Il porte une immense part de beauté, de courage, d’espoir. La beauté, comme la quête du succès, sont les chemins pour s’élever, pour prendre de la hauteur, de l’importance… Quitte à se déraciner. Quitte à ne plus vivre au présent. Où se situe la frontière à ne pas franchir? Alors, à l’heure où le mouvement Metoo se trouve légitimé, pourquoi ne pas écrire notre bout d’histoire? Garder Marilyn tout près de nous, tout au long, et prendre la parole. Deux femmes, un homme ( faut bien, un peu quand même…), pour inventer des histoires vraies, en rire, s’en offusquer. User de nos failles, de nos contradictions, de nos fascinations pour, nous aussi, nous élever, prendre de la hauteur, et voir si, de la haut le monde est aussi beau qu’on le dit. ( et chuchoter des mots d’amour à l’oreille de Norma Jean. Sinon, à quoi bon faire ce spectacle?)

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